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L’effet boomerang

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Cette description aborde 2 sujets distincts.

Le but du militantisme est de :

  1. faire changer un contexte. Pour que ce dernier change, il est nécessaire d’avoir…
  2. un changement des mentalités et un changement de la structure sociétale. Pour avoir un changement des mentalités il est nécessaire que…
  3. le message soit compris. Pour que le message soit compris il faut…
  4. s’adapter à la personne en face. C’est-à-dire utiliser des méthodes dont l’objet est d’assurer l’adaptation réciproque d’un contenu de formation et des individus à former. Vous venez de lire la définition de la pédagogie.

Cette adaptation comprend les facteurs suivants :

  • Employer un vocabulaire et des concepts accessible à l’autre
  • L’écoute active
  • Une bonne disposition mentale
  • Une ouverture à l’échange

Tout cela pour pouvoir permettre la remise en question.

Nous connaissons tou·te·s le terme pédagogie mais en réalité nous devrions parler d’andragogie (science et pratique de l’éducation des adultes).

Nous avons besoin de faire attention quand nous luttons parce que nous pouvons mal faire. Nous pouvons desservir la cause que l’on défend.
En psychologie sociale, on parle de l’effet boomerang quand une tentative de persuasion a l’effet inverse de celui attendu, et renforce les attitudes de la cible plutôt que de les modifier.
C’est une réalité que nous devons prendre en compte.

Les principes de base pour éviter cet effet serait :

  • Ne pas insulter ;
  • Ne pas couper la parole ;
  • Utiliser un vocabulaire accessible ;
  • Eviter le champs lexical de l’injonction ;
  • S’arrêter si on perd patience.

Voici une chaîne YouTube de EduKey consacrée au sujet et que j’invite tout·e militant·e à consulter car notre premier outil de lutte est l’information. L’esprit critique sert à l’acquérir, l’andragogie à le diffuser.
https://www.youtube.com/channel/UC6wF0stG_iXMO4mIXM9g3YQ/videos

Une nuance de plus :

Se faire entendre dire « tu nuis à ta cause » ne signifie pas que c’est le cas. Bien souvent cet allégation est prononcée lorsque la personne est en manque d’argument et cherche à maintenir sa position en attaquant la personne sur ce qu’elle est. « Tu nuis à ta cause » signifie en fait à ce moment « tu as sûrement raison mais tu ne peux pas me convaincre puisque tu t’y prends mal ».
Ce qui est en fait une attaque ad personam servant à faire un chiffon rouge (sophisme consistant à amener et à traiter un autre sujet que ce celui qui est discuté).

Tout cela étant dit, voilà une bonne occasion de profiter de cette illustration pour parler de la condition des australien·ne·s natif·ve·s ; aborigènes et indigènes du détroit de Torrès.

Pour résumé le contexte historique :

James Cook, explorateur, navigateur et colon anglais, prend possession aux deux tiers de l’Australie pour le Royaume de Grande-Bretagne, malgré les ordres du roi George III stipulant qu’il devait d’abord conclure un traité avec la population indigène. Son rapport à Londres déclare que l’Australie est inoccupée « terra nullis ».

En 1770 l’île est officiellement revendiquée par la Grande-Bretagne. Le 26 janvier 1788 (jour de la fête nationale australienne) est fondée la colonie pénitentiaire de Nouvelle-Galles du Sud. L’Australie sert alors de prison à ciel ouvert sur laquelle l’Angleterre envoie ses condamnés. 5 autres colonies suivront formant en 1901 le Commonwealth d’Australie.
Les aborigènes vivent en Australie depuis plus de 50 000 ans.

En 1788, l’Australie était peuplée d’environ 250 tribus, couvrant tout le continent, chacune d’entre elles ayant sa propre langue, ses lois et ses frontières tribales avec une population totale estimée à 350 000 personnes, qui représente la plus ancienne culture existant sur Terre.

En 150 ans après la colonisation, la population aborigène décline fortement à cause :
• des nouvelles maladies ;
• des déplacements ;
• du changement de mode de vie ;
• de massacre orchestrés par les colons.

En 1980 on recensait 230.000 Aborigènes en Australie, soit moins de 2% de la population totale du pays. 70% d’entre eux sont métis.

De 1869 à 1969, le gouvernement australien met en place une politique d’occidentalisation avec ce qui ce que l’on nomme les « générations volées ». Cela consiste à enlever les enfants aborigènes et indigènes afin de faire disparaître les aborigènes en tant que groupe culturel, linguistique et ethnique identifiable. Ce « génocide culturel » vient s’ajouter à la volonté de certains colons et descendants de colons de vouloir exterminer les aborigènes.

La colonisation de l’Australie s’est faite via l’impérialisme, le racisme, le sexisme et le spécisme.
On parle du « Grand silence australien » pour designer le fait que cette partie de l’histoire du pays soit généralement occultée. À l’heure actuelle, les australien·ne·s d’occident font un blocage quant à leur passé. Par honte, par déni… Alors que dans la première partie du XXe siècle, les violences envers les aborigènes étaient communément admises.

En 1890, la section 25 de la constitution est amendée de la sorte :
« Disposition relative aux races disqualifiées »
« Aux fins de la section précédente, si par la loi d’un Etat toutes les personnes de quelque race que ce soit sont disqualifiées pour voter aux élections de la plus nombreuse Chambre du Parlement de l’Etat, alors, en calculant le nombre de personnes de l’Etat ou du Commonwealth, les personnes de cette race résidant dans cet Etat ne seront pas comptées. »

Puis en 1898 la section 51 accorde de pouvoir de faire des lois spéciales pour les personnes de toute race.

Ces deux articles sont encore dans la constitution de nos jours bien qu’en 2012 le gouvernement envisage de proposer un référendum pour faire changer la constitution. Celui ci n’aura pas lieu sur le motif que les mentalités ne sont pas prêtes.

Aujourd’hui il est inapproprié de parler de séquelles tant la situation des aborigènes est toujours scandaleuse.
• Les clichés racistes que nous connaissons également en France : criminel·le·s violent·e·s, assisté·e·s, parents indignes, paresseux·ses, illettré·e·s… ainsi que les insultes qui vont avec ;
• Les aborigènes vivent en marge de la société et souffrent d’un rejet du fait du racisme et de la perte de repère liée à la colonisation ;
• Le racisme provoque du stress et des réactions émotionnelles / cognitives négatives qui ont des effets négatifs sur la santé mentale et affectent les systèmes immunitaire, endocrinien, cardiovasculaire et autres systèmes physiologiques ;
• Le fait d’être en moins bonne santé entraîne des comportements à risque comme la prise de drogue (alcool et tabac inclus) ;
• L’espérance de vie des aborigène est inférieure de 17 ans au reste de la population australienne ;
• Le taux de mortalité infantile est 5 fois plus élevé ;
• La précarité est très forte et beaucoup d’aborigènes vivent dans des conditions insalubres et dangereuses ;
• Le cas de dépression sont nombreux et le taux de suicide est élevé.

– https://blogs.crikey.com.au/croakey/2013/11/21/how-do-we-build-a-health-system-that-is-not-racist-start-by-taking-this-online-test/
https://nyaspubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/j.1749-6632.1999.tb08114.x

Les aborigènes subissent une infantilisation et donc un paternalisme d’état qui vient tout droit des principes coloniaux : « Les aborigènes ne pourront être sauvés que s’ils agissent comme les blanc·he·s » autrement dit « Ces peuples sont sauvages et doivent être éduqués ». Le système de ration qui leur sont attribuées ne sont pas accepté dans les magasins de liqueur afin qu’ils ne puissent pas acheter d’alcool.
https://www.greenleft.org.au/content/paternalism-its-impact-indigenous-communities

La destruction de la culture aborigène passe aussi par l’appropriation culturelle. Le style pictural traditionnel aborigène a été noyé par le pointillisme. Bien que l’on retrouve des traces anciennes de ce procédé, il fait réellement son apparition en 1970 dans un camp ou des aborigènes ont été parqués pendant 20 ans. De nos jours encore, la technique est tellement appréciée par les occidentaux que des galeries d’art n’hésitent pas à employer dans des conditions misérables des descendant·e·s de natif·ve·s pour les faire peindre des toiles puis vendre leur travaux à prix d’or.
Des peintres ont tiré profit du pointillisme afin de cacher le sens de leur peinture pour le préserver, sous des myriades de points, sachant que les toiles seraient vendues et exposées. Les peintures aborigènes ont de nombreuses fonctions culturelles, du rituel introspectif à la transmission de savoir en passant par la dimension mystique appelée « Wapar » ou « Tjukurpa » selon le dialecte et traduit approximativement par « temps du rêve ».

Les lieux sacrés, tel qu’Uluru ou Kata-Juta sont devenus des sites touristiques.
Dans la culture aborigène le sol est sacré car il aurait été crée par des grands ancêtres. Raison pour laquelle les aborigènes ne faisaient pas d’agriculture ou tout autre aménagement de la terre.
Avec l’appropriation des terres, il leur a été retiré leur source d’alimentation mais également leur sérénité spirituelle. (Non pas qu’il soit question de défendre le principe de croyance)

A l’arrivée des Européens, il existait entre 250 et 300 langues parlées et 600 dialectes. Aujourd’hui, seuls 200 langues et dialectes subsistent dont 180 en voie d’extinction.

Il n’était pas prévu de faire une description aussi longue, mais elle est encore bien courte par rapport à tout ce qui pourrait encore être dit. La situation est excessivement complexe et il est possible que ce qui est écrit au dessus ne soit pas assez précis et peut être même caricatural. C’est un exercice délicat de parler d’une culture et d’une oppression qui n’est pas la nôtre.

La volonté première derrière cette note était de visibiliser l’oppression que subissent les premièr·e·s habitant·e·s de l’Australie. Au court de la rédaction, il est apparu que c’est une belle démonstration d’une prise de conscience amenée par la pédagogie. Les historien·ne·s s’appuient sur des faits et transmettent leurs conclusions. Cette note était rédigée avec le regret de ne pas avoir de moyen d’action à proposer. Mais le drame aborigène repose en partie sur le voile qui a été posé sur son histoire et la tentative de destruction de sa culture. Prendre connaissance de tout ce que vous venez de lire, c’est déjà faire quelque chose en luttant contre l’oubli et en empêchant l’ignorance d’achever ce génocide culturel.

Discours d’excuse du premier ministre australien Kevin Rudd en 2008 :
– https://www.youtube.com/watch?v=b3TZOGpG6cM

Si vous souhaitez aller plus loin :
– https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2012-3-page-70.htm
– http://geopolis.francetvinfo.fr/les-aborigenes-daustralie-une-minorite-marginalisee-10175
– http://www.liberation.fr/planete/2017/04/06/en-australie-la-lente-reconnaissance-des-aborigenes-et-des-insulaires_1560201
– https://www.creativespirits.info/aboriginalculture/people/racism-in-aboriginal-australia
– http://institut-symbiosis.com/2011/08/les-mythes-aborigenes-ou-le-temps-des-reves/
– https://books.google.fr/books?id=xWT2tbzG6GwC&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

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